Vies de chiens
Parfois un quartier, des potes à retrouver.
Le temps de jouer, d’une virée. Former un clan. Parfois le semblant d’un foyer.
Parfois errants, jamais fixés, ni aux mêmes endroits, ni aux mêmes instants.
Parfois bien tombés. Quelqu’un pour nourrir, protéger, aimer. Parfois quelqu’un à nourrir, à protéger. Quelqu’un à aimer.
Ou parfois juste tombés. Tombés du nid. Abandonnés.
Parfois recueillis. Sauvés.
Parfois porter un collier.
Parfois l’estomac creux faire les poubelles. Survivre.
Parfois nourris par un passant, le ventre rempli régulièrement. Espérer juste un regard, une attention.
Ou juste qu’on leur foute enfin la paix putain. Retirés. Cloîtrés. Reclus.
Manger. Dormir. Jouer. Se promener. Découvrir. Garder. Veiller. Attendre. Passer le temps.
Parfois avoir pour seul luxe la caresse du rayon de soleil, l’ombre des feuilles modulée par la brise l’été, ou juste un ciel clément c’est déjà ça.
Parfois connaître l’immense joie de l’estomac qui se tait. À la maladie s’être une fois de plus dérobé. Parfois n’avoir que le froid et l’humidité pour envelopper sa solitude.
Vivre sur les restes d’une autre communauté. Qui n’aurait veut-on croire rien de commun.
Parfois avoir tout. N’avoir rien.
Il suffit parfois d’un rien.
Ils s’appellent parfois, Blanche, Twist, Sophie, Socrate, Flupke, Bichette, Oscar, Mouette, Virgule, Bill, Ouragan ou le vagabond, parfois Damien, Christina, Roberto, Jolie, Ezra, Audrey, Jean-Jacques, Adama, Zach, Axel, Macha, Andy, Rachel, Nadia, Chung-Ho, Abu, Berth, Magdalena, Moussa, Germaine, Kathlyn, Luis, Stefan, Michel, Victoria, Reine, Dan, Vladimir, François, Sylvie, Wally, Jason, Salem, Brenda, Dalia, Irina, Dao, Nikola, Robert, Suliman, Maxim, Natalia, Ichi, Lucie, Gustav, Alan, Adriana…
Ou alors n’ont plus personne pour les appeler.
Parfois n’avoir que les étoiles sous lesquelles rêver.
Et pour unique richesse, être.