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Journal | Mars 2023

vendredi 21 avril 2023, par LR

 
  • mercredi 1er,
La cité des illusions (City of Illusion)
La cité des illusions (City of Illusion)

La cité des illusions (City of Illusion), roman d’Ursula K. Le Guin, 1967, dans la traduction de Jean Bailhache, Le Livre de Poche

Poursuite de mon exploration du Cycle de l’Ekumen, nous suivons Falk, personnage perdu sans plus aucun souvenir, à la quête de son passé et de son identité sur une planète où l’on ne sait plus ce qui tient du mensonge ou de la vérité. Un roman une nouvelle fois assez profond, sur l’identité, les récits qui la fondent, la manipulation, ou la peur. Très agréable lecture (même s’il ne détrône pas dans mon cœur La main gauche de la nuit et Les dépossédés).

 

 
  • jeudi 2,
Dracula
Dracula

Dracula (Bram Stoker’s Dracula), film de Francis Ford Coppola, 1992

Film que je n’avais encore jamais eu l’occasion de voir, je profite de la sortie ciné de sa version remastérisée, sur grand écran donc. Et je dois dire que je ne m’attendais pas à ça ! Ça déborde, ça dégueule et ça dégouline en même temps que ça fourmille de jeux formels subtils (les effets spéciaux ont pas forcément super bien vieilli), les jeux d’ombres côtoient un gloubi-boulga que même S.O.S. Fantômes a pu éviter (je crois... peut-être faudrait-il que je ne revoie pas), et le pire, c’est que mon impression est la même sur le fond. L’histoire semble jouer avec les symbolismes, christianisme, sorcières, vampires, pouvoir symbolique du sang, vie éternelle, transmission (filiale et aussi infectieuse, « années SIDA » obligeant peut-être à aborder le sujet, même si hors sujet), sexualité et spiritualité, mélangeant le tout dans une indescriptible purée cryptique. Apparemment c’est vendeur, moi ça me laisse sur le côté. Si bien que je ne sais plus trop ce que j’ai vu finalement : un film d’auteur, un blockbuster de studio à gros budget, ou bien une chimère difficilement regardable.

 

 
  • vendredi 3,
Alain Resnais, l'audacieux
Alain Resnais, l’audacieux

Alain Resnais, l’audacieux, film de Pierre-Henri Gibert, 2022

Documentaire format télé (1h à peine) très sympa, qui permet de découvrir un peu mieux, derrière cette apparence pudique et sérieuse, un enfant effectivement audacieux, voire facétieux, qui toute sa vie a regardé les adultes droit dans les yeux et les soutenant d’un sourire ingénu tout en faisant ses petites expériences, dans une quête créative rigoureuse et d’une incroyable inventivité, en toute simplicité. J’ai beaucoup aimé le document, et son sujet encore un peu plus.

 

 
  • samedi 4,
Empire of Light
Empire of Light

Empire of Light, film de Sam Mendès, 2023

Une ode au cinéma, mais aussi et surtout un propos humaniste qui s’intéresse à tous les personnages, les connus et inconnus, ceux que l’on côtoie au quotidien ou ceux que l’on ne croise qu’un instant, chacun revêtant la même profondeur, un puits d’histoires personnelles qui constituent l’identité de chaque être. Avec des personnages remarquablement bien écrits, complexes et profonds, le film aborde aussi bien l’ombre que la lumière, ce que l’on montre à l’écran mais aussi la petite pièce technique à laquelle peu ont accès (tout comme la grande salle de bal vestige des rêves anéantis), ce que l’on cache, deux faces indissociables qu’il nous faut apprendre à aimer. Car parfois on ne comprend pas tout, a-t-on cependant besoin de tout connaître et tout savoir pour simplement aimer et respecter ? Au-delà de chaque façade, de chaque affiche, de chaque visage, se cache une histoire longue et complexe, par-delà toute tentative de simplification, de catégorisation, réduction facile et pratique d’un monde pour garder l’illusion d’une prise sur celui-ci. Jeux des acteurs et photographie tout aussi remarquables, ça ne gâche rien. =)

 

 
  • lundi 6,
Vous n'avez encore rien vu
Vous n’avez encore rien vu

Vous n’avez encore rien vu, film d’Alain Resnais, 2012

Resnais prend une nouvelle fois plaisir à mêler cinéma et théâtre et jouer sur les relations floues entre imaginaire et réalité, conviant ses acteurs (de cinéma) à incarner leurs propres rôles de comédiens (de théâtre), eux-mêmes conviés à réactiver les souvenirs de leurs rôles de théâtre en regardant sa nouvelle adaptation filmée. Une mise en abîmes multiples à la fois drôle et profonde, qui ne fait que prouver que l’enfance facétieuse n’a pas d’âge, d’autant plus qu’elle se rit de la mort. Beaucoup aimé.

 

 
  • mercredi 8,
La vengeance des mères
La vengeance des mères

La vengeance des mères, roman de Jim Fergus, dans la traduction de Jean-Luc Piningre, 2016, 2018 pour l’édition lue, Lizzie

Suite de Mille femmes blanches. Redondant avec Mille femmes blanches et même en interne, narration confuse, ne m’a strictement rien apporté à part une bonne dose d’exaspération. Décision rare chez moi : Amazones (le troisième) passera aux oubliettes sans jugement.

 

 
  • lundi 13,
De pierre et d'os
De pierre et d’os

De pierre et d’os, roman de Bérengère Cournut, 2019, 2020 pour l’édition lue, Lizzie

Une sacrée expérience de lecture, ici d’écoute, dans laquelle Bérengère Cournut nous invite à pénétrer un peu la culture inuit, par le récit d’une vie qui sort totalement des représentations occidentales. Un récit contant un rapport au monde totalement différent. Sans prendre par la main, sans prisme occidental, une immersion quasi sensorielle. L’intellect (le mien du moins) n’a pas perçu grand chose, ça se passe ailleurs. Un formidable expérience, à renouveler (une deuxième lecture ou écoute propose sûrement un nouveau niveau de perception).

 

 
  • mardi 14,
Willy Ronis : se retrouver
Willy Ronis : se retrouver

Willy Ronis : se retrouver, exposition au Musée de Pont-Aven, 4 février-28 mai 2023

//penser à màj l’adresse du lien fin mai//
Une expo assez agréable à parcourir, pour une sélection intéressante de tirages, même si j’ai ressenti une sorte de malaise, comme si Ronis était, malgré la vie tout autour, les regards caméra, la musique qu’on entendrait presque sortir des cadres, en dehors de tout ça, extérieur et lointain, comme s’il n’arrivait pas à trouver sa place, à l’exact opposé par exemple de quelqu’un comme Vivian Meyer. Ici point de miroir, presque une grotte où se cacher, comme faute de pouvoir avoir prise sur le monde. Impression heureusement modérée par d’autres images vues par ailleurs. Ouf. Me reste tout de même cette sensation, interrogeant le positionnement du photographe et ses motivations, à creuser peut-être.

 

The Son
The Son

The Son, film de Florian Zeller, 2023

Pas à la hauteur du sublime The Father, certes, Florian Zeller continue ici sa trilogie familiale et explore le rapport père-fils du point de vue du fils, mais aussi et surtout de l’adolescence, abordant les thèmes de la dépression, de la sensation d’abandon et du suicide. Et ce que j’ai apprécié le plus, c’est la sincérité avec laquelle il aborde cette période complexe faite d’absolus, parfois sans repères. Tout est décuplé, romantisme et lacérations. Tantôt à vif, tantôt apathique. Zeller n’a semble-t-il pas tout oublié de cette période, et même si c’est parfois limite « too much », j’ai bien aimé ces portraits.

 

 
  • vendredi 17,
Impossible
Impossible

Impossible, roman d’Erri de Luca, dans la traduction de Danièle Valin, 2020, Écoutez lire

Huis-clos dialectique entre l’accusé et le juge, huis clos montagnard dans les grands espaces. Tentative de compréhension, ou de réfutation, de l’impossible coïncidence, lorsque le donneur d’alerte d’un accident mortel a été quarante ans auparavant dénoncé par celui qui a dévissé. Patiemment, l’attente du faux-pas. Pendant ce temps, la question de l’engagement, de la trahison, de l’amitié, du respect, de la justice. Belle découverte, j’ai trouvé remarquablement bien écrit, et bien lu par Denis Podalydès, dont j’adore le présence, et Laurent Natrella, donnant vie à cette joute verbale philosophique de haut vol. L’aspect très intellectuel et très référencé ne plaît probablement pas à tous, mais même si je n’en suis pas particulièrement fan, je reconnais que ça ne fait pas de mal, bien au contraire.

 

 
  • dimanche 19,
Vivre (Ikiru)
Vivre (Ikiru)

Vivre (Ikiru), film d’Akira Kurosawa, 1952

En réponse au Vivre (Living) vu en décembre.
Autrement plus profond et subtil ; une mise en scène puissante, un montage rythmé. Des images fortes formant symboles. Pourquoi donc faire un remake pour juste faire une mauvaise copie sans rien apporter, voire pour dénaturer ?

 

 
  • jeudi 23,
Rhinocéros
Rhinocéros

Rhinocéros, pièce d’Eugène Ionesco, 1959, Folio Gallimard

J’étais incapable de me souvenir si je l’avais déjà lu, ou ne serait-ce qu’ouvert, ou non. Je crois savoir pourquoi. En effet, cette pièce, sous le sceau de l’absurde (style ou procédé cher à mon cœur), s’intéresse à la montée des extrémismes de tous ordres (pour l’époque, nazisme et stalinisme, rayer la mention inutile, mais bien sûr adaptable à tout courant de « pensée ») finissant par s’insinuer dans la population jusqu’à devenir une norme. Avec le recul confortable dont je dispose (c’est sûrement plus facile de parler de ça en 2023 qu’en 1959), j’ai trouvé ça chiant et facile, et pour tout dire un peu creux. J’espère que je trouverai un peu plus consistant pour une éventuelle prochaine incursion chez Ionesco, sinon je retournerai chez tonton Beckett !

 

 
  • mercredi 29,
Street Photography : le savoir-faire du photographe de rue
Street Photography : le savoir-faire du photographe de rue

Street Photography : le savoir-faire du photographe de rue, livre technique de David Gibson, traduit par Fabienne Gondrand, 2014, Dunod

Très intéressant bouquin plein d’enseignements. Pas forcément ceux de Gibson lui-même, qui semble s’autoproclamer grand photographe, ce que j’ai surtout apprécié, ce sont les focus justement sur les travaux d’artistes à travers le monde. Leur démarche, leur point de vue, leur signature. Les questions artistiques et éthiques, les interrogations relatives au positionnement du photographe, en écho à l’expo Willy Ronis.

 

The Wire Saison 4
The Wire Saison 4

The Wire Saison 4, série de David Simon, 5 saisons, 2002-2008

Retour sur une série que je n’avais pas encore eu l’occasion de finir de regarder, faute de mettre la main dessus tout simplement. Tout d’abord, The Wire (ou encore Sur écoute) est une série réaliste, quasi-documentaire, qui nous plonge dès la première saison dans le quotidien de flics qui sont loin d’être des héros (ni de sombres abrutis) et de revendeurs de drogue de tous niveaux qui sont loin d’être d’horribles méchants. Pas d’anges non plus, juste des personnes qui essayent de faire ce qu’elles peuvent dans le monde où elles (sur)vivent, avec les possibilités qu’on leur offre, les enjeux et les contraintes définis par leur environnement. Plus qu’un polar, une véritable enquête sociale, qui mènera le spectateur au fil des saisons à comprendre le maillage fin et tortueux qui constitue une ville comme Baltimore, en dépeignant ses différents milieux : la police, la justice, la rue, le port, l’immobilier et la finance, la politique, et ici l’éducation (ou plutôt le système éducatif). Là encore, des personnes prises dans le filet des enjeux, des budgets, des résultats officiels et officieux, la destinée de gamins des rues. Aux antipodes de tout manichéisme, c’est humain, passionnant et puissant.

 

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